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Retour sur BikingMan Portugal

Une rencontre avec soi-même.

Texte et photos d'Adrien Beroud

Un BikingMan, c’est une rencontre. Une rencontre avec des paysages. Une rencontre avec l’autre. Une rencontre avec soi-même.

Le BikingMan Portugal, c’est une boucle de 1000 kilomètres avec 12000 mètres de dénivelé positif au départ de Faro, qui traverse l’Alentejo et l’Alagarve. Le tout réalisé en autonomie, sans assistance et en un temps maximum de 120 heures.

Pour cette aventure, je naviguais dans les eaux inconnues de l’ultradistance. Mon corps allait-il supporter la charge ? Mon matériel avait-il été choisi judicieusement ? Ses questions me hantaient. Une seule certitude, j’avais fait le bon choix de vélo avec un Anticosti de la marque Québécoise Panorama. Certes plus lourd que mon vélo de route carbone, mais tout aussi réactif et bien plus confortable.


Le 02 mai 2022, à 5h00 du matin, je prenais donc le départ de ma première épreuve d’ultradistance en compagnie d’environ 110 participants. Objectif : environ 200 kilomètres par jour voire 250 pour terminer cette boucle en 4 ou 5 jours. Nous prenions donc tous la route pour rouler à travers les collines et les plaines de l’Alentejo. Pendant que les premiers roulaient à vive allure, je prenais mon temps pour trouver mon rythme et admirer le paysage. Un vent de face à décorner les bœufs usait les organismes, il fallait lutter constamment contre cet élément. Les lignes droites s’enchaînaient et les kilomètres s’égrainaient doucement. Le parcours était émaillé de magnifiques villes et villages fortifiés , tels que Mértola, Serpa ou bien Monsaraz qui sera mon point de chute pour la nuit, situé à 290 kilomètres du point de départ, bien au-delà de mon objectif initial.

Après une bonne nuit réparatrice, je reprends la route le lendemain à 5h00 du matin, direction le checkpoint numéro 1 de Vila Viçosa que j’atteins après 2 heures de vélo. Les jambes sont bonnes, et j’arrive sur une portion beaucoup plus plate et bien plus à mon avantage. J’enchaîne donc les kilomètres, sur mon Anticosti qui gomme chaque aspérité de la route, tel un métronome en direction de la côte et de l’Algarve. Au kilomètre 400, les premières douleurs aux fesses surviennent, erreur dans le choix de la selle ou du cuissard ? Je ne sais pas, mais ces douleurs arrivent bien trop tôt et je sais qu’il va falloir serrer les dents jusqu’à l’arrivée. Je continue malgré tout et termine cette deuxième journée sans encombres après un peu plus de 280 kilomètres pédalés.

Le lendemain, les fesses, à vif, sont douloureuses. Je repars à 4h00 du matin en direction du checkpoint numéro 2 à Sagres. Alors que le soleil se lève, je découvre la superbe côte de l’Algarve. Puis après être passé par une section Gravel, j’arrive en milieu de journée au CP2. Le moral est bon. Je discute avec les organisateurs qui nous attendent avec le sourire malgré la fatigue puis enfourche à nouveau mon Anticosti pour attaquer les difficultés de la fin de parcours. Je me trouve maintenant sur de magnifiques petites routes qui serpentant dans les collines. Pourtant, je n’en profite pas pleinement, je me trouve dans une longue montée entre Romeiras et Marmelete avec des pentes à plus de 10%, mes jambes brûlent et mes fesses ne sont plus qu’un immense carpaccio douloureux. J’enchaîne les difficultés jusqu’à Monchique avant de me laisser redescendre jusqu’à mon point de chute pour la nuit, un agréable gîte situé à Santa-Clara-a-Velha.

Dernier jour. Je reprends la route à 4h00 du matin, il me reste environ 190 kilomètres à faire. Je sais que je vais arriver à Faro dans la journée, bien avant mes prévisions. Pourtant je n’ai pas le moral. Je pédale seul, dans la nuit, les larmes inondant mon visage. Je pense à ma belle-sœur disparue la semaine précédente, à ma famille, et aux obsèques qui auront lieu dans la journée. Mon corps est au Portugal mais mon esprit ailleurs. Je traîne ma misère pendant plusieurs kilomètres, puis je ne sais comment, l’appel de Faro peut-être, mon corps et mon esprit ne font à nouveau plus qu’un et je me mets à accélérer, la douleur et la tristesse ont disparu. Je fais les 100 derniers kilomètres à vive à allure. Je passe la ligne d’arrivée 79 heures et 57 minutes après le départ. Un flot d’émotions m’inonde, les vannes lâchent, je m’écroule dans les bras de David et Laurence, deux concurrents avec qui j’ai sympathisé avant le départ et qui m’attendaient sur la ligne, et je pleure toutes les larmes de mon corps heureux d’en avoir terminé avec cette formidable aventure.

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